Le New-York miniature d’Alan WOLFSON…

A Lyon du 17/10/2014 au 15/02/2015…

Découverte d’un artiste miniaturiste de grand talent, l’américain Alan WOLFSON, qui sculpte par petits bouts le New-York de son enfance et expose du 17/10/2014 au 15/02/2015 au Musée de la Miniature et du Cinéma de Lyon…

Un jour, promis, j’écrirai cet article sur le tueur aux maquettes qui sévit tout au long de la Saison 7 des Experts… En attendant, je ne peux m’empêcher de m’intéresser au travail des artistes miniaturistes, qu’ils représentent des scènes de crime (ce n’est pas le cas avec Alan WOLFSON) ou qu’ils sculptent à merveille des lieux et des décors qui excitent notre imagination.

Pas montrée dans l’expo, mais je ne peux qu’avoir de la tendresse pour elle, la maquette de la « AAA Detective Agency » sculptée en 1986, hommage – inventé de toutes pièces – de l’auteur au film noir des années 40. A rapprocher de la « Chambre de Détective » signée Mathieu Chollat et Dan Ohlmann, conservée au MIM de Lyon…

AAA Detective Agency, 1986 - © AlanWolfson.net

Tranches de ville, tranches de vie…

Natif de Brooklyn où il a grandi dans les années 50, Alan WOLFSON crée ce qu’il appelle des « sculptures urbaines miniatures », façades datées et remarquables qu’on devine sur le point de disparaître, petits morceaux de rues ou de quartiers à New-York (son thème de prédilection) ou encore à Jersey City où il a vécu. Rarement une réplique exacte, le plus souvent une combinaison de lieux existants (ou ayant existé), de souvenirs, d’histoires vécues et de détails pittoresques, toujours plus proches de la « perspective d’artiste » que de la maquette d’architecture.

A New-York, Alan WOLFSON sculpte les bouches de métro, stations et quais déserts (dont on verra à Lyon : « Brooklyn Bridge Station », « Canal Street Cross section » ou « Subway at Bleecker Street »), intérieurs des rames couverts de graffitis (le magnifique « To Atlantic Avenue » de 1982), des snacks, diners et restaurants typiques (comme « Hopp’s Luncheonette », « Ma’s Home Cooking » ou le très célèbre « Katz’s Deli »), de petits hôtels miteux, refuges de célibataires en goguette ou de futurs grands écrivains (« St. George Hotel« , « Times Square Hotel Room »), des cinémas (« Rialto Cinema », « Strand Cinema », mais aussi « Hudson Hotel »…) ou des cabarets et sexshops (dont « Follies Burlesk », « The Casbah Club », « Peepworld » et le tout récent « Paradise-Playhouse »), plus particulièrement situés à Manhattan dans le quartier de Times Square…

Il a fallu 18 mois à l’artiste A. WOLFSON pour réaliser ce chef d’œuvre en multi-dimension « Canal Street Cross Section » (68,6 x 59,7 x 49,5cm) – © AlanWolfson.net

Tout à fait emblématique de l’art d’Alan WOLFSON, et l’un des chefs-d’œuvre qu’on pourra admirer à Lyon, la pièce intitulée « Canal Street Cross Section » (68,6 x 59,7 x 49,5cm) réalisée en 2009/2010, sorte de « carottage » de la ville de New-York au niveau d’un de ses plus grands « hubs » (la station de métro de Canal Street étant située à la frontière des quartiers de Chinatown, Little Italy et SoHo) et révélant plusieurs niveaux en profondeur :

  • Au niveau 0, l’angle de rue avec la bouche de métro, la pizzeria dont on peut apercevoir l’aménagement intérieur, l’entrée de la boutique de caoutchouc Canal Rubber et celle du salon de massage chinois
  • Au niveau -1, le quai de métro (vu de face) et l’intérieur de la station, les couloirs, et l’accès aux quais (vus transversalement à travers une ouverture pratiquée sur le côté droit de la « boîte »)
  • et au niveau -2, l’intérieur d’un wagon, en coupe longitudinale (pour la vue de face), et transversale via la fenêtre ouverte sur le côté gauche de la « boîte ».

On a non seulement un plan de coupe en 3D, mais également des vues transversales parfaitement détaillées, qui laissent imaginer la complexité de la conception d’un tel diorama.

« Peepworld », 2007 – © AlanWolfson.net
"Peepshow" : vue sur les cabines vidéo...

Avec ses néons qui clignotent, son éclairage élaboré et ses nombreuses « vues » différentes (façade, intérieur du bar Subway Inn, intérieur du sex shop du rez-de-chaussée avec sa librairie pour adultes et son arcade vidéo équipée de cabines privées, cabines de peep-show au 1er étage et loges des danseuses), « Peepworld », réalisé en 2007, est un autre fameux exemple de la complexité et de la minutie du travail d’Alan WOLFSON.

Dans ce palais du porno de fiction (seul le « Subway Inn » existe, quelque part dans l’Upper Eastside), les scènes comme l’arcade vidéo ou les cabines de peep-show, très détaillées sont perçues à travers les ouvertures ménagées sur les côtés de l’œuvre et nous mettent, nous aussi, dans une position de « voyeurs ».

"Peepshow" : "Had to call the maintenance guy"...

Avec humour, Alan WOLFSON raconte sur son site s’être inspiré d’une maquette de l’Opéra de Paris vue au Musée d’Orsay !!!

Une multitude de minuscules accessoires – sextoys sous blisters suspendus sur des présentoirs, mini magazines pornos illustrés, monnayeurs (en état de marche ?), tabourets de bar, canettes de boisson, mouchoirs (ou lunettes de soleil !) abandonnés, seau et balai-serpillère et même boîte à outils de l’homme à tout faire – nous laissent appréhender la vie et le tas d’histoires individuelles qui se déroulent à chaque minute dans ces lieux.

« Mechanical window in booth stuck in ‘open’ position – Had to call the maintenance guy.” / ”Le rideau de séparation entre les deux était coincé et restait ouvert. Il a fallu que j’appelle le gars de la maintenance », commente WOLFSON sur son site, comme s’il était le propriétaire des lieux (!)

Le contraste entre la vision côté client avec les affiches, les lumières, les messages publicitaires… et la loge des performeuses avec la photo du caniche, des enfants ou des neveux, les cartons de pizza et les lignes de coke est flagrant…

« Follies Burlesk », 1987 – © AlanWolfson.net

Sur le même thème, l’adorable « Follies Burlesk » (43,81 x 48,89 x 54,61cm), qui date de 1987 (soit 20 ans auparavant !), joue l’accumulation entre fast food, salle de cinéma, cabaret et sex shop et rend bien l’effervescence crasse du Times Square d’avant Giuliani. Ici encore, on peut descendre dans la bouche de métro, s’aventurer dans le sex shop du rez-de-chaussée et apercevoir l’intérieur du restau de hot dogs dans tous ses minuscules détails. On note aussi la touche d’humour de l’artiste avec le clin d’œil à Schwarzenegger…

L’art du détail…

Alan WOLFSON le reconnait volontiers :

« My sculptures are seldom an exact representation of an existing location. Usually, they are either totally from my imagination, or a combination of details from many different environments.” / Mes sculptures sont rarement la représentation fidèle de véritables lieux. Elles naissent la plupart du temps de mon imagination ou de la combinaison de multiples détails provenant d’environnements différents” (A propos de “Village Cigars”, une œuvre de 1985 représentant une petite boutique de cigares de Greenwich Village)  –

“Once again, not everything in reality is visually interesting” / “Comme je l’ai déjà dit, tout, dans la réalité, n’est pas visuellement intéressant », dit-il, en s’excusant presque (sur son site, à propos de « Terminal Diner », une pièce de 1990) –

Pour travailler, Alan WOLFSON s’appuie sur des photos (dont certaines sont d’ailleurs visibles sur son site), imagine le plan idéal capable de concilier toutes les vues et commence par travailler toutes les scènes intérieures, avant de passer à l’habillage extérieur.

Et il fait tout lui-même, à base de bois, carton, papier et métal, mais surtout matière plastique. Les éléments graphiques sont réalisés sur Photoshop. Seule la modélisation des circuits électroniques des éclairages les plus sophistiqués est sous-traitée (Source : on « lighting » in Q&A  sur le site de l’auteur).

L’échelle de ses premières œuvres – et notamment « Occupied Hotel Room » en 1979 -, qui est celle habituellement utilisée pour les maisons de poupées, a très vite laissé place à l’échelle 1/23ème (où 1,2 pouce ou inch = 1 pied, si mes calculs sont exacts !)

Affiches à moitié arrachées, graffiti sur les murs, vieux papiers (comme dans « To Atlantic Avenue », ci-dessous, ou «  Peepland » en 1983), et jusqu’au mini-tiny pourboire abandonné sur une table de restaurant dans « MidtownDiner » (1983), ce sont les détails qui manifestent la vie. Des personnages dans ces décors auraient forcément l’air faux, alors que sans eux « on peut réellement s’immerger dans la scène et inventer son propre récit », explique Alan WOLFSON (Cf. (In Q&A sur le site de l’auteur).

“What I’m trying to do is, I’m trying to give you scenery, lighting and enough props so you can come up with your own narrative…so you can put on your own show”/”Ce que j’essaie de faire, c’est de fournir le décor, l’éclairage et suffisamment d’accessoires pour que vous inventiez votre propre histoire, votre propre spectacle », dit-il dans une ITV à la chaîne de radio californienne KPCC du 16/09/2014.

“The real impact of my work is not in how small everything is, but in the stories these small things tell”/”La vraie force de mon travail n’est pas tant dans la miniature que dans les histoires que ces miniatures parviennent à raconter” (In Q&A sur le site de l’auteur).

« To Atlantic Avenue », 1982 : le métro new-yorkais typique des années 80 – © AlanWolfson.net

Ses clients sont des collectionneurs, souvent des natifs de New-York attachés à leur ville, leur quartier, aux petits commerce de la rue où ils ont grandi….

Une réalité revisitée ? En fait, Alan WOLFSON semble ne jamais avoir quitté le New-York de son enfance et c’est aussi à travers ses yeux de petit garçon – mobiles, curieux, des yeux d’enfant – qu’il nous le fait découvrir. D’où peut-être ses thèmes fétiches : le métro (qu’il dit avoir pris seul aussi souvent que possible dès l’âge de 10 ans), l’épicerie et ses trésors, les cinémas ou les librairies pour adultes.

Non seulement, des milliers de moments, de vies ont été vécus derrière ces murs, mais toutes les histoires restent à écrire, c’est pourquoi il n’y pas d’acteurs dans ces décors de cinéma. C’est le New-York d’Alan WOLFSON, leur New-York et le nôtre aussi, peuplé de tous les images qui peuplent déjà notre imaginaire. Pas sordide, mais bien fascinant, plein de couleurs et de lumières, de portes entrouvertes, de fenêtres sans rideaux (qui révèlent d’autres scènes), de bouches de métro qui appellent à l’aventure, de promesses en tout genre…

Plus que jamais avec WOLFSON, New-York est « la ville qui ne dort jamais » !

Et comme les photos ne rendent pas justice au travail de cet artiste en multidimension, nous ne saurions trop vous conseiller de sauter dans le prochain train pour Lyon et le MIM !

J’ai hâte de les voir en vrai !!!

Liste des oeuvres d’Alan WOLFSON présentées dans l’exposition rétrospective « New-York Urban Visions » du 17/10/2014 au 15/02/2015 au Musée Miniature et Cinéma de Lyon :

◆ Canal Street Cross Section – 2009/2010
◆ Peepworld – 2007
◆ Strand Cinema – 2013
◆ Times Square Hotel Room – 1982
◆ Follies Burlesk – 1987
◆ Flamingo Motor Court – 1993
◆ Rialto Cinema – 1999
◆ Wall Street Subway Platform – 2008
◆ Hopp’s Luncheonette – 2008
◆ Subway at Bleecker Street – 2013
◆ Hudson Hotel – 1984
◆ Paradise Playhouse – 2014
◆ Miss America – 2000
◆ Boulevard Drinks – 2003
◆ Ma’s Home Cooking – 1991
◆ Casbah Club – 2008
◆ Brooklyn Bridge Station – 2008
◆ Saint Georges Hotel – 1994
◆ Katz’s Deli / Closing time – 2012

En Savoir plus :

Cet article est ma quatrième participation au Challenge New-York avec Café Powell

3 thoughts on “Le New-York miniature d’Alan WOLFSON…

  1. Pingback: Tout New-York (en miniature) est à Lyon - NewYorkMania « NewYorkMania

    • admin dit:

      Ca vaut vraiment le coup ! Les découvrir « en vrai », lumineuses, en relief, et non aplaties par la photo, c’est vraiment extraordinaire ! Super expérience ! Elles seront là jusqu’au 15 février 2015, y a plus qu’à organiser un grand week-end à Lyon, la ville est tellement agréable…

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