Une conférence du festival « London Calling » le 16/12/2011…
Dans le cadre du Festival du film « London Calling » organisé du 07/12/2011 au 29/02/2012 par le Forum des Images à Paris, le critique Frédéric BAS donnait le 16 décembre 2011 un cours de cinéma sur Londres et « La Figure du Serial Killer ».
Si l’on sait que le terme « serial killer » proprement dit est né aux Etats-Unis dans les années 1970 et que la filmographie du SK est essentiellement américaine, reste que c’est autour de Londres, sur le vieux continent, et presqu’un siècle auparavant, que s’est créée toute l’imagerie autour de ce personnage très actuel.
Comment le Londres de la révolution industrielle et de la première exposition universelle de 1851 est-il devenu la ville du crime au cinéma ? A partir de quels éléments cette image s’est-elle construite ? Et comment le personnage du tueur en série a-t-il évolué dans l’œil des cinéastes qui s’y sont intéressés ?
Faits divers, sources littéraires, films de réalisateurs britanniques tels que Hitchcock, Michael Powell ou même Christopher Smith, mais aussi les meilleurs films du cinéma américain et des conseils de lectures autour de la figure du Serial Killer, vous trouverez ici les références de l’ensemble des œuvres citées par Frédéric BAS lors de sa conférence que vous pourrez également retrouver à la fin de cet article.
NB : pour certaines sources littéraires, on a choisi de préférence des éditions bilingues, mais VO ou VF, tout est accessible !
Les sources littéraires britanniques : Stevenson, Conan Doyle, Oscar Wilde et Bram Stoker
F. Bas note que, curieusement, ce sont des écrivains d’origine écossaise (Stevenson et Conan Doyle) et irlandaise (Oscar Wilde et Bram Stoker) qui vont donner forme à la mythologie d’un Londres criminel et à la figure du Serial Killer…
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1. « L’Étrange cas du docteur Jekyll et M. Hyde », de Robert Louis STEVENSON (1886)
Double personnalité, pulsion criminelle enfouie, figure du monstre et incarnation du mal absolu, hypocrisie sociale de l‘époque victorienne, description du vice et des bas-fonds de Londres, la nouvelle d’épouvante de Stevenson est « la matrice absolue » de la figure du Serial Killer, et son personnage de Hyde un archétype, qui donnera naissance à d’innombrables adaptations…
- A lire à propos de Jekyll et Hyde :
Frédéric BAS conseille en particulier l’article « Cherchez la femme » de Cécile Petit, dans ce livre consacré à « Dr Jekyll & Mr Hyde » sous la direction de Jean-Pierre NAUGRETTE (coll. Figures mythiques, Ed. Autrement, 1997). Actuellement indisponible.
La fiction « Le crime étrange de Mr Hyde » de Jean-Pierre Naugrette (1998)… Passionné de Stevenson et de littérature victorienne, Jean-Pierre NAUGRETTE choisit ici la fiction et le pastiche en récrivant la nouvelle de STEVENSON, du point de vue de Mr Hyde, cette fois !
- Principales adaptations de Dr. Jekyll et Mr. Hyde au cinéma :
Frédéric BAS en cite 3 : la version muette de John S. Robertson avec John Barrymore en 1920, celle de Rouben Mamoulian avec Frédéric March en 1931, et celle de Victor Fleming, avec Spencer Tracy, Ingrid Bergman et Lana Turner, en 1941 :
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2. La seconde source littéraire est évidemment Conan DOYLE et sa série des Sherlock Holmes
dont le premier volume « Etude en rouge » (A Study in Scarlet) est publié en 1887, le second, « Le Signe des Quatre » (The Sign of the Four) en 1990 :
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3. « Le Portrait de Dorian Gray » d’Oscar WILDE (1890)
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4. « Dracula » de Bram STOKER (1897)
Jack l’Eventreur : du fait divers (1988) au mythe… La représentation classique du tueur londonien
Fin 1988 à Londres, 5 meurtres sauvages en l’espace de quelques mois contre des prostituées retrouvées égorgées et éviscérées dans le quartier de Whitechapel. Le maniaque sexuel est le premier à utiliser les médias pour narguer la police et créer l’hystérie collective. Il ne sera pourtant jamais identifié, toutes les hypothèses restant ouvertes, à tel point que la journaliste et auteur de polars Patricia CORNWELL se saisira à nouveau de l’enquête en 2003…
Essais, romans, adaptations cinématographiques, séries télé, bandes dessinées et même jeux vidéo, Jack the Ripper n’a pas fini de faire parler de lui !
En croisant ces 3 sources (les sources littéraires + le fait divers Jack l’Eventreur + l’influence de l’expressionnisme allemand), explique Frédéric BAS, le cinéma construit la représentation classique du criminel londonien.
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Le film fantastique « Le Cabinet des Figures de Cire » de Paul Leni et Leo Birinsky en 1924
voit la première apparition de Jack l’Eventreur au cinéma. C’est un film de l’expressionnisme allemand (introuvable en DVD zone 2)
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« The Lodger – A Story of the London Fog » de HITCHCOCK (1927) :
C’est HITCHCOCK qui, le premier, met en scène le personnage de Jack l’Eventreur dans un film long métrage (Autres titres : Les Cheveux d’or / L’Éventreur).
Inspiré de l’expressionnisme allemand, ce film muet qu’Hitchcock considérait comme son premier grand film, met en place l’héroïsation du tueur par la presse et les médias… Déjà avec Hitchcock, le tueur est dans les yeux du public qui le regarde. Dans ce film, le Serial Killer – ou du moins le suspect – est un étranger dans la ville, il vient de l’extérieur et c’est rassurant. Ce ne sera bientôt plus le cas au cinéma…
NB : à propos du film « The Lodger », lire les entretiens Truffaut/Hitchcock (le « Hitchbook » !) parus en 1966 :
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Le film expressionniste allemand : « Loulou » de Pabst (1929)
Sur le sujet de la ville, Frédéric BAS conseille de lire l’entrée « Expressionnisme » dans le livre « La Ville au Cinéma » sous la direction de Thierry Jousse et Thierry Paquot (2005) et de revoir « Métropolis » de Fritz LANG (1927) :
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Autres genres d’adaptations de Jack l’Eventreur :
Littérature, roman graphique… et même adaptation cinématographique du roman graphique !
– Fasciné par ces crimes, le poète surréaliste Robert DESNOS publie son récit des faits « Jack l’Eventreur » en 1928 :
– Le Roman graphique « From Hell » d’Alan Moore (1993) :
– … et son adaptation au cinéma : le film « From Hell » des frères Hughes, avec Johnny Depp (2002) :
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« Jack l’Eventreur, Affaire classée », l’enquête de Patricia Cornwell en 2003 :
Le 2ème âge du killer (londonien) au cinéma : Michael POWELL, HITCHCOCK [et les autres]…
A partir des années 50 jusqu’à nos jours, les cinéastes vont jouer avec cette imagerie classique du tueur en série pour dire des choses très intéressantes sur le statut du tueur, le tueur londonien devenant une sorte de paradigme ou modèle du tueur avec des films qui resteront à jamais.
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Le film « Peeping Tom » (en français : « Le Voyeur ») du britannique Michael Powell (1960)
… marque le 2ème âge du Serial Killer au cinéma. Un chef d’œuvre absolu, dit Frédéric BAS, dans lequel le tueur (qui travaille dans le cinéma) devient le cinéaste, l’artiste (le « voyeur »)…
Idée encore plus choquante encore : le tueur, c’est le spectateur, le cinéphile. On sort de l’imagerie cliché, pour aller vers des images beaucoup plus violentes, et le thème du tueur en série devient une réflexion sur le cinéma.
Avec ce film, Michael POWELL va devenir la référence absolue de nombreux cinéastes américains (DE PALMA, SCORSESE…).
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« Frenzy » d’Hitchcock (1972)
Ton parodique, recherche du réalisme avec un meurtre filmé dans sa durée ; le meurtrier en série est cette fois un commerçant londonien (le tueur est parmi nous…)
A partir de « Frenzy », explique Frédéric BAS, c’est de plus en plus le corps assassiné qu’on va montrer, un éclairage réaliste qui conduit jusqu’au film d’horreur…
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Dans ce genre du film d’horreur…
On retiendra en particulier les films :
– « Le Loup Garou de Londres »/An American Werewolf in London de l’Américain John LANDIS (1981), célèbre parodie des films d’horreur et petit bijou de références et de citations aussi bien littéraires que cinématographiques.
– Et « Creep » du britannique Christopher SMITH (2004), où le cinéaste fait vivre toutes les angoisses à son héroïne dans le labyrinthe du métro de Londres.
Œuvres mentionnées lors de la séance de Questions/Réponses :
Lors de la séance Questions/Réponses (non reprise dans la vidéo de la conférence), ont été également évoqués par le public ou par Frédéric BAS :
- Le film « L’Ombre d’un doute » (titre original : Shadow of a Doubt) d’Alfred Hitchcock, sorti en 1943, met aussi en scène un SK, tueur de riches veuves.
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La référence moderne absolue pour une filmographie du Serial Killer
…est évidemment américaine, plus qu’anglaise, avec « Le Silence des Agneaux » de Jonathan DEMME (1991) et sa descendance : « Seven » (1995) et « Zodiac » (2000) de David FINCHER.
Frédéric BAS rapporte que c’est en le voyant jouer dans « Elephant Man » de David Lynch (1980) que Jonathan Demme a eu l’idée de proposer à Anthony Hopkins le rôle d’Hannibal Lecter dans « le Silence des Agneaux ». Le vrai Joseph Merrick était contemporain de Jack l’Eventreur et dans son histoire, le criminel était la foule, la société…
A noter également : le tueur du Zodiaque des années 60 a copié Jack l’Eventreur en envoyant des courriers à la presse. Il n’a pas non plus été identifié.
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Pour une filmographie française sur les SK ?
– Une évocation du personnage historique de Lacenaire, le « poète assassin », apparaît dans le film » Les Enfants du paradis » de Marcel Carné, en 1945
– Le téléfilm : « Le Testament du Docteur Cordelier » de Renoir (1959)
– « L’étrangleur » de Paul Vecchiali (1970)
– Version parodique : « La Cité de la Peur » d’Alain BERBERIAN, sur un scénario des Nuls (1994)
– « La dernière Séance » de Laurent Achard (2011) – pas encore édité en DVD
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Et la Série TV « Dexter » de James MANOS Jr. (2006-…) ?
– « Elle fera date ! », dit Frédéric BAS :
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Autres conseils de lecture ou de documentation :
– « De l’Assassinat considéré comme un des Beaux-Arts » de Thomas de QUINCEY (1854)
– « Les Particules élémentaires » de Michel Houellebecq (1998)
– A paraître en mars 2012 : « Le Dictionnaire des assassins et des meurtriers »
à paraître chez Calmann-Lévy en mars 2012, auquel F Bas a participé.
– A voir aussi en DVD, « Dans la tête d’un tueur en série avec Stéphane Bourgoin » (2010), le documentaire en 4×25’ de ses entretiens avec 6 SK et une tueuse en série diffusés en 2010 sur la chaîne télé Planète Justice.
La video de la conférence en elle-même (durée : 1h17)
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